Trois affaires plus sérieuses témoignent d'un malaise récurrent dans les relations entre les Guérétois et les troupes casernées dans l'ancien couvent des Augustines. En mai 1816, au début de la seconde Restauration, la légion départementale passa provisoirement sous les ordres du chef de bataillon Dorsanne, fervent royaliste berrichon mais officier médiocre, "manquant de tact et de mesure" et dont "la tête était mal organisée". Quelques soldats se permettaient à son égard "des plaisanteries et même des ris indécens" qui lui firent perdre son sang froid. Le 21 mai, à l'occasion d'une revue, il constata que le fusilier Antoine SILLIARD, originaire du Grand-Bourg, n'avait pas son sac. D'un coup de poing, il fit tomber le shako du jeune soldat et, alors que ce dernier se penchait pour le ramasser, il lui enfonça son sabre dans le dos. SILLIARD décéda à l'hospice de Guéret deux jours plus tard, tandis que la consternation et la colère s'abattaient sur la ville. Dorsanne fut simplement déplacé à Montpellier après son acquittement par le Conseil de guerre et termina sa carrière colonel en 1830.

En 1822, c'est une rixe qui ensanglanta la ville, à la suite d'une querelle opposant lors d'un bal masqué quelques artisans à des soldats du 12ème léger. L'affaire dégénéra dans les jours qui suivirent et, le 20 février, un sergent posté devant la caserne agressa deux jeunes gens qui passaient. De nombreux Guérétois étant accourus, le sergent appela la garde à son secours. Celle-ci intervint avec une extrême violence, frappant les passants à coups de sabres, de pierres et de bâtons, "couchant en joue des hommes paisibles étrangers à cette affaire". Un garçon cordonnier nommé GILLET reçut un coup de baïonnette dans le bas-ventre et resta plusieurs jours entre la vie et la mort. Le lendemain, trois soldats de corvée de bois furent pris à partie par la foule et échappèrent difficilement au lynchage. Le calme ne revint qu'avec le départ précipité de la compagnie pour Limoges.

Le 21 septembre 1828, c'est encore une série de provocations dues à des militaires du 17ème léger qui dégénéra en une bagarre très violente au cours de laquelle Paul MILTIADE, un sergent originaire d'Angers, trouva la mort d'un coup de pierre.

On peut penser que ces incidents, toujours provoqués par les militaires eux-mêmes, contribuèrent à conforter la masse des Creusois dans son "peu de goût pour l'état militaire " que déplorait alors l'administration préfectorale.

Sources : Almanach pittoresque et historique de la Creuse pour 1998 et Archives Nationales.