J'avais 11 ans en 1938. Une partie des troupes mobilisées à Montluçon passait devant chez mes parents, avenue Gambetta, pour rejoindre la caserne des Augustines. La mobilisation était imminente. Les accords de Munich entre Hitler, Daladier et Chamberlin, repoussa d'un an la vraie mobilisation générale.
Je rejoignis cette dernière année de paix, la troupe des Scouts de France, qui avait leur local rue du Prat, en face de l'imprimerie Fouriaud, entre les maisons de la rue du Prat et le Boulevard Carnot. Il y avait une cour qui permettait de faire l'apprentissage de l'alignement pour les diverses manifestations officielles.



Cette pièce est la boucle de mon ceinturon ; la partie où se trouve la croix Scout avec un tréfle, est la partie mobile qui dégrafait le ceinturon en faisant un quart de tour.

Nos principales occupations consistaient à faire des sorties en campagne, les dimanches, et faire des exercices musculaires ; des jeux étaient programmés par nos chefs. Notre lieu préféré était les environs du château de La Villatte. A cette époque, et après le repas froid, nous marchions en direction de St Sulpice le Guérétois et au-delà pour rejoindre notre local à Guéret. Tous nos déplacements se faisaient à pied, et le soir chez nos parents, le sommeil ne tardait pas à venir... !
Je me souviens particulièrement d'une sortie sur les sentiers du Maupuy, pour rejoindre le bourg de St Léger le Guérétois un samedi soir, avec hébergement dans une grange pour passer la nuit, après avoir pris une collation consistante.
A cette époque, les carrières étaient en pleine exploitation, et je me souviens d'une chose, c'est la végétation de plantes piquantes, et avec nos culottes courtes et le foin, le sommeil fut long à venir... ! Ce n'était qu'un mauvais passage.

Mes parents m'avaient inscrit pour aller passer deux semaines en colonie de vacances à l'île d'Aix, avec des jeunes comme nous, entourés de jeunes curés de Limoges. Ce fut un beau voyage avec divers jeux et la baignade de l'après midi, un séjour bienfaisant, en bord de mer.
De retour à Guéret, le chef de troupe, Mr Denis -fondeur assisté de Jacques Martin- réfugié parisien, nous attendait pour participer au "tournoi des vraies patrouilles" qui aurait lieu durant la dernière semaine de septembre, avant de reprendre nos études le 1er octobre. Les scouts de Limoges étaient également de la partie, et nous arrivâmes au château de Vallematte, une immense propriété située près de la Jonchère (87). Nous étions chargés comme des baudets, car nous avions besoin d'outils de cordage, et notre nécessaire personnel. J'étais chef de patrouille des "Eperviers" et je conduisais mes patrouilleurs au lieu où nous devions camper, en bordure d'un immense bois de chênes. Sans perdre de temps les tentes furent montées et la table à feu installée. Il y avait deux autres patrouilles de Guéret qui furent placées dans notre secteur. Quand aux scouts de Limoges, il y avait une dizaine de patrouilles. La semaine fut vite passée, non sans avoir essuyé un violent orage, nous forçant à décamper, pour finir la nuit dans une grange à foin... Le lendemain, le soleil était avec nous, et les activités manuelles reprirent leur cours. Chaque patrouille avait choisi sa spécialité, nous avions pris "travail manuel et matelotage". La semaine s'écoula très vite, nous étions en pleine action et très motivés. Tous les soirs, avant de rejoindre nos abris de toile, nous nous rendions au rassemblement général, pour chanter quelques chants, afin de reprendre notre travail le coeur à l'aise. Mon second de patrouille, François CAVERNES était un précieux atout. Se dépensant sans compter, nous avions pris notre rôle au sérieux et François était très habile et actif. Le dernier matin arriva, il fallu ranger le matériel, démonter les tentes, remettre en l'état ce lieu comme nous l'avions trouvé. Seule l'herbe avait jaunie. Il fallait maintenant rejoindre la troupe pour quitter les lieux l'après midi.

Le dernier repas nous fut offert par le propriétaire... un homme dévoué pour le Clergé.
Toutes les patrouilles furent rassemblées dans la grande cour du château pour recevoir les résultats des gagnants, selon la spécialité choisie. Nous fûmes très agréablement surpris d'apprendre que nous étions premiers dans notre spécialité. Un cadeau souvenir nous fût remis, suivi de nos remerciements. La joie d'avoir gagné était notre récompense.



Badge de menuisier cousu sur la manche droite. Il pouvait y en avoir plusieurs selon les capacités du Scout.


Nous quittâmes le château pour prendre la route en direction de la Jonchère en chantant des chants scouts. J'étais fier, en tête de ma patrouille, porteur du bâton surmonté d'un fanion, flanqué d'un Epervier. Une page était tournée, mais nous avions appris des choses utiles dans une ambiance amicale et joyeuse.
Une demie-heure d'attente pour monter dans le train qui nous ramenait à Guéret.
Une heure plus tard, nous sortions de la gare, et chacun rejoignit sa famille avec ses bagages.

A suivre...